Vers un monde sans pauvreté

Livre Vers un monde sans pauvreté

L’entreprise sociale et l’avenir du capitalisme

Public Affairs,
Également disponible en : Anglais


Com­men­taires

Dans cet excellent ouvrage, volontiers provocateur, Muhammad Yunus, laurĂ©at du Prix Nobel de la Paix, expose sa vision de l’entreprise sociale, une entitĂ© d’un nouveau genre gĂ©rĂ©e comme une entreprise Ă  but lucratif mais dont l’objectif principal, loin des prĂ©ceptes chers au capitalisme, est le profit social. Sa vision est tout sauf utopique. En crĂ©ant la Grameen Bank, cĂ©lĂšbre institution financiĂšre de microcrĂ©dit, Yunus s’est fait le pionnier d’un nouveau concept : la mi­cro­fi­nance. Plus rĂ©cemment, sa col­lab­o­ra­tion avec le Groupe Danone a permis la crĂ©ation d’une entreprise commune pour produire et com­mer­cialiser des yaourts fortifiĂ©s au Bangladesh. Cet ouvrage relate l’implication de son auteur dans des entreprises sociales et propose de prĂ©cieuses suggestions quant Ă  leur Ă©volution future. BooksInShort recommande la lecture de cet opus Ă  tous les dirigeants d’entreprise et en­tre­pre­neurs tournĂ©s vers l’avenir et qui souhaitent que leurs projets contribuent non seulement Ă  leur intĂ©rĂȘt propre mais Ă©galement Ă  l’intĂ©rĂȘt de la sociĂ©tĂ© en gĂ©nĂ©ral.

Points Ă  retenir

  • Le capitalisme est un systĂšme injuste avec une conception faussĂ©e de la nature humaine.
  • La « triple performance » du profit financier, social et en­vi­ron­nemen­tal est une chimĂšre car une seule performance, la rĂ©munĂ©ration des in­vestis­seurs, importe aux yeux des entreprises cap­i­tal­istes.
  • La Grameen Bank dĂ©montre que des in­sti­tu­tions novatrices peuvent aider Ă  Ă©radiquer la pauvretĂ©.
  • La Grameen Bank a permis aux vil­la­geoises dĂ©munies de se libĂ©rer de la tyrannie des usuriers.
  • Ceux qui in­vestis­sent dans une entreprise sociale ne s’attendent pas Ă  une rĂ©munĂ©ration en retour plus importante que le capital investi.
  • L’entreprise sociale substitue un objectif de profit social Ă  l’objectif de rendement capitaliste.
  • De telles entreprises sociales peuvent Ă©radiquer la pauvretĂ©.
  • Les organismes Ă  but non lucratif ne peuvent pas contribuer Ă  Ă©radiquer la pauvretĂ© car les donateurs ont tendance Ă  limiter leurs dons dans les pĂ©riodes de crises.
  • Les entreprises sociales sont gĂ©rĂ©es comme des entreprises Ă  but lucratif mais axent leurs efforts sur l’amĂ©lioration sociale.
  • Le groupe français Danone a lancĂ© une entreprise sociale au Bangladesh.
 

Résumé

Le problĂšme du capitalisme

Le capitalisme comporte de nombreux avantages, et tout autant de limites et de carences. En effet, il n’est pas dotĂ© d’une conscience sociale ou de fondements Ă©thiques. Selon la philosophie de la « re­spon­s­abilitĂ© sociale des entreprises » (RSE), les entreprises doivent viser un objectif de « performance triple » aux niveaux financier, social et en­vi­ron­nemen­tal. Pourtant, le systĂšme capitaliste leur interdit formelle­ment de privilĂ©gier la re­spon­s­abilitĂ© sociale. Pour les entreprises tra­di­tion­nelles, la re­spon­s­abilitĂ© sociale est finalement synonyme d’ir­re­spon­s­abilitĂ© financiĂšre.

« Dans leur forme actuelle, les marchĂ©s libres ne sont pas conçus pour rĂ©soudre les problĂšmes sociaux. À l’opposĂ©, leur fonc­tion­nement pourrait exacerber la pauvretĂ©, la maladie, la pollution, le crime et les inĂ©galitĂ©s. »

Un capitalisme sans entraves permet au riche de s’enrichir, au pauvre de s’appauvrir, au fort de diriger et de mar­gin­aliser le faible. Les mĂ©canismes actuels suivants visant Ă  limiter et Ă  contrĂŽler le capitalisme au profit du pauvre se sont rĂ©vĂ©lĂ©s inappropriĂ©s :

  • Les gou­verne­ments : Bien entendu, les gou­verne­ments peuvent apporter leur con­tri­bu­tion. Certaines nations dĂ©veloppĂ©es disposent de systĂšmes dĂ©mocratiques et de rĂšgle­men­ta­tions sophistiquĂ©es leur permettant de se prĂ©munir contre la pollution, la fraude, les produits dangereux et autres maux sociaux. Ces pays disposent d’in­fra­struc­tures bien dĂ©veloppĂ©es permettant l’échange d’in­for­ma­tions et de capital, et obligeant Ă  une pratique de commerce Ă©quitable. Pourtant, la fraude et l’ex­ploita­tion surviennent parfois, mĂȘme dans les pays dĂ©veloppĂ©s. Elles reprĂ©sentent un problĂšme encore plus important pour le monde en dĂ©veloppement, et les dĂ©fis auxquels doivent faire face les gou­verne­ments de ces pays sont considĂ©rables.
  • Les organismes Ă  but non lucratif : Les organismes Ă  but non lucratif canalisent la gĂ©nĂ©rositĂ© des riches de ce monde et bien qu’ils ac­com­plis­sent des actions non nĂ©gligeables, la charitĂ© a toutefois ses limites : bien souvent, les flux de fonds s’in­ter­rompent dans les pĂ©riodes difficiles, prĂ©cisĂ©ment au moment oĂč les pauvres en ont le plus besoin.
  • Le multilatĂ©ralisme : Les in­sti­tu­tions et agences multilatĂ©rales, telles que les banques de dĂ©veloppement rĂ©gional, la Banque Mondiale et la SociĂ©tĂ© financiĂšre in­ter­na­tionale, disposent de mandats pour Ă©radiquer la pauvretĂ© et participer au dĂ©veloppement Ă©conomique. Toutefois, elles combinent Ă  la fois les dĂ©savantages des gou­verne­ments et ceux des organismes Ă  but non lucratif. En effet, elles sont aussi bu­reau­cra­tiques et intĂ©ressĂ©es que les gou­verne­ments, et aussi peu financĂ©es et in­con­sis­tantes que les organismes Ă  but non lucratif.
  • Re­spon­s­abilitĂ© sociale des entreprises : La re­spon­s­abilitĂ© sociale des entreprises revĂȘt deux formes. Dans la premiĂšre, il est dit qu’il ne faut « nuire ni aux individus, ni Ă  la planĂšte (sauf si c’est au dĂ©triment du profit) ». Dans la seconde, il est dit qu’il « faut agir pour le bien des individus et de la planĂšte (du moment qu’on peut le faire sans renoncer au profit) ». Ces deux formes de re­spon­s­abilitĂ© sociale ont certes des intentions louables, mais au bout du compte, les entreprises doivent rĂ©pondre aux exigences des in­vestis­seurs. Le capitalisme est in­tran­sigeant avec les entreprises qui placent les in­vestis­seurs en seconde ou en troisiĂšme position. Ainsi, la performance double ou triple de la re­spon­s­abilitĂ© sociale des entreprises prĂȘte Ă  confusion. Une seule performance, la rĂ©munĂ©ration des in­vestis­seurs, s’impose toujours en fin de compte.

Entreprise sociale

Une entreprise sociale n’est ni un gou­verne­ment, ni une Ɠuvre de bi­en­fai­sance, ni une institution multilatĂ©rale. En fait, les entreprises sociales sont semblables Ă  des organismes Ă  but lucratif du point de vue de leur or­gan­i­sa­tion. Elles ont des employĂ©s et produisent ou vendent des produits et des services. Cependant, le but commercial sous-jacent n’est pas de rĂ©aliser des profits, mais de fournir un bĂ©nĂ©fice social. Les entreprises sociales ne vendent pas leurs produits ou services Ă  perte. C’est la principale diffĂ©rence entre les entreprises sociales et les organismes Ă  but non lucratif. Les entreprises sociales gĂ©nĂšrent de l’argent. NĂ©anmoins, leurs bĂ©nĂ©fices ne sont pas destinĂ©s aux in­vestis­seurs et sont rĂ©investis dans le dĂ©veloppement, afin qu’ils bĂ©nĂ©ficient Ă  davantage d’individus. Les entreprises sociales, comme toute autre entreprise, ont leurs propres in­vestis­seurs, mais ceux-ci ne s’attendent pas Ă  une rĂ©munĂ©ration importante en retour. En effet, les entreprises sociales promettent seulement aux in­vestis­seurs qu’ils rĂ©cupĂšreront leur capital de dĂ©part. Il existe deux sortes d’entreprises sociales :

  • Les entreprises qui favorisent les avantages sociaux par rapport au profit : Les in­vestis­seurs de ces entreprises sont dĂ©sireux d’apporter une aide Ă  la sociĂ©tĂ© plutĂŽt que de recevoir le rendement le plus Ă©levĂ© sur le capital investi.
  • Les entreprises qui cherchent Ă  optimiser leur bĂ©nĂ©fice, mais dont les propriĂ©taires sont pauvres : Le bĂ©nĂ©fice social fourni par ces entreprises est de reverser leurs profits aux pauvres pour qu’ils puissent sortir de la pauvretĂ©.
« La thĂ©orie du libre marchĂ© souffre d’une ‘dĂ©faillance de con­cep­tu­al­i­sa­tion’, d’une incapacitĂ© Ă  saisir l’essence mĂȘme de l’humain. »

Parmi les in­vestis­seurs finançant des entreprises sociales, on trouve des fondations, des in­sti­tu­tions multilatĂ©rales, des gou­verne­ments et mĂȘme des entreprises Ă  but lucratif dont la prioritĂ© est d’amĂ©liorer la sociĂ©tĂ©. Le groupe français Danone a, par exemple, participĂ© Ă  la mise en place d’une entreprise sociale au Bangladesh.

« Afin d’attirer les in­vestis­seurs, je propose de crĂ©er une bourse spĂ©cialisĂ©e qui pourrait porter le nom de bourse sociale. Seules les so­cial-busi­ness pourraient y ĂȘtre cotĂ©es. »

Les entreprises sociales ont des antĂ©cĂ©dents historiques. À l’époque oĂč de nombreux propriĂ©taires de moulins main­te­naient les tra­vailleurs manuels dans une situation d’endettement auprĂšs des magasins de la compagnie, Robert Owen (1771-1858) a créé des magasins coopĂ©ratifs qui vendaient des produits Ă  un prix lĂ©gĂšrement supĂ©rieur au coĂ»t de fabrication. Ces magasins furent les premiĂšres entreprises coopĂ©ratives du commerce de dĂ©tail. De nombreuses coopĂ©ratives de ce genre existent de nos jours.

La Grameen Bank

Au milieu des annĂ©es 1970, Muhammad Yunus, alors professeur d’économie, a compris les raisons pour lesquelles les individus pauvres de son pays restaient pauvres, mĂȘme s’ils tra­vail­laient dur : ils Ă©taient sous l’emprise d’usuriers. Lors d’une con­ver­sa­tion avec une villageoise qui fabriquait des tabourets en bambou, il a appris que les intĂ©rĂȘts appliquĂ©s aux petites sommes d’argent qu’elle empruntait pour acheter du matĂ©riel pouvaient s’élever Ă  10 % par jour. En outre, l’usurier lui prĂȘtait de l’argent Ă  la seule condition qu’elle lui vende ses produits en exclusivitĂ©, produits dont il fixait lui-mĂȘme les prix. Yunus s’entretint avec d’autres vil­la­geoises et apprit que leur emprunt total ne dĂ©passait pas 856 takas (monnaie locale du Bangladesh) ou 27 dollars. Yunus remboursa les dettes contractĂ©es par les vil­la­geoises et mit en place un systĂšme leur permettant d’échapper Ă  l’emprise des usuriers. Il dĂ©cida de crĂ©er une banque d’un nouveau genre au service des plus pauvres, mais pour cela, il devait rĂ©former la lĂ©gislation bancaire en vigueur au Bangladesh. Les pressions permanentes qu’il exerça lui permirent de faire voter la loi nĂ©cessaire Ă  la crĂ©ation de la Grameen Bank en 1983. La Grameen Bank accorde des prĂȘts aux plus pauvres des pauvres. Depuis sa crĂ©ation, elle a prĂȘtĂ© 6 milliards de dollars et a enregistrĂ© un taux de rem­bourse­ment de 98,6 %. La Grameen Bank est rentable, comme toute autre banque. De fait, elle n’a enregistrĂ© des pertes qu’en 1983, 1991 et 1992, et a permis Ă  prĂšs de deux tiers de ses clients de sortir de la pauvretĂ©. La Grameen Bank s’est Ă©galement engagĂ©e dans les domaines de l’énergie re­nou­ve­lable et de la santĂ©, et dans d’autres projets profitables pour la sociĂ©tĂ©.

Le Groupe Danone

L’idĂ©e de Grameen Danone a Ă©mergĂ© en 2005, lors d’une rĂ©union entre Yunus et Franck Riboud, prĂ©sident et PDG du Groupe Danone. Riboud a expliquĂ© Ă  Yunus que, tra­di­tion­nelle­ment, sa famille Ă©tait « socialement innovatrice et pro­gres­siste », et qu’il souhaitait trouver un moyen d’aider les pauvres Ă  se nourrir. Yunus proposa de crĂ©er une entreprise commune pour produire des yaourts fortifiĂ©s pour les enfants Ă  un prix trĂšs accessible, permettant ainsi d’aider Ă  rĂ©soudre le problĂšme de la mal­nu­tri­tion au Bangladesh. Le modĂšle choisi pour l’entreprise commune ressemble Ă  celui d’une entreprise sociale, qui vend des produits, rĂ©investit les bĂ©nĂ©fices dans l’entreprise et ne verse aucuns dividendes aux in­vestis­seurs. Le Groupe Danone a dĂ» quelque peu revoir son approche habituelle. En principe, le groupe ne construit qu’une seule grande usine pour distribuer ses produits sur un marchĂ© rĂ©gional. Cependant, Yunus conseilla Ă  Riboud de crĂ©er des petites usines qui achĂšteraient leur lait auprĂšs de fermiers locaux, qui, pour la plupart, avaient obtenu leur premiĂšre vache grĂące Ă  un emprunt contractĂ© auprĂšs de la Grameen Bank. Penser petit Ă©tait inĂ©dit pour les ingĂ©nieurs du dĂ©partement de conception in­dus­trielle de la multi­na­tionale. À leur grande surprise, ils purent s’apercevoir qu’une petite usine pouvait fonctionner de maniĂšre aussi rentable qu’une grande.

« Le meilleur moyen de lutter contre la pauvretĂ© est de permettre aux femmes pauvres d’acquĂ©rir dignitĂ© et indĂ©pendance. »

La rĂ©frigĂ©ration reprĂ©sentait un autre dĂ©fi. Tra­di­tion­nelle­ment, Danone conservait ses yaourts rĂ©frigĂ©rĂ©s depuis la production jusqu’au point de vente, mais la plupart des villageois qui achetaient et vendaient ces yaourts n’étaient pas alimentĂ©s en Ă©lectricitĂ©. Ainsi, la dis­tri­b­u­tion de la marchandise devait ĂȘtre rapide et les yaourts devaient ĂȘtre consommĂ©s dans les 48 heures aprĂšs leur production. Danone a ainsi dĂ©veloppĂ© un rĂ©seau de dis­tri­b­u­tion en col­lab­o­ra­tion avec des « dames de la Grameen », des vil­la­geoises qui avaient empruntĂ© Ă  la Grameen Bank.

La fin de la pauvreté

La fin de la pauvretĂ© est Ă  portĂ©e de main. Les pauvres ne sont pas pauvres Ă  cause d’une faiblesse de caractĂšre ou par manque de volontĂ© face au labeur, mais parce que les in­sti­tu­tions et les rĂ©gle­men­ta­tions favorables aux riches ne leur sont pas favorables. Au Bangladesh, les pauvres ne pouvant emprunter aux organismes bancaires tra­di­tion­nels tombaient entre les mains d’usuriers dont ils devenaient les esclaves. Le capitalisme n’incite pas les entreprises Ă  proposer leurs services aux pauvres, mais bien Ă  les exploiter. Certains prĂ©jugĂ©s, telle que l’idĂ©e que les emprunteurs pauvres ne rem­bours­eront pas leur prĂȘt, empĂȘchent souvent les hommes d’affaires de remettre en question les mĂ©thodes con­ven­tion­nelles. Les exemples de la Grameen Bank et de Grameen Danone prouvent que les structures et approches d’entreprises Ă  but lucratif peuvent ĂȘtre appliquĂ©es au service d’objectifs profitables Ă  la sociĂ©tĂ©.

« Les AmĂ©ricains et les autre habitants des pays riches peuvent profiter aujourd’hui de leur mode de vie prodigue. Mais dans le long terme, quel sera le prix Ă  payer en termes de de­struc­tions Ă©cologiques et de conflits militaires pour maintenir indĂ©finiment leur niveau de vie ? »

La technologie de l’information, par exemple, peut devenir une vĂ©ritable force de dĂ©moc­ra­ti­sa­tion et de libĂ©ration des pauvres. L’accĂšs aux tech­nolo­gies de l’information pourrait permettre aux fermiers de villages reculĂ©s de connaĂźtre le prix des marchan­dises sur des marchĂ©s plus grands et de refuser ainsi le prix proposĂ© par l’acheteur local : ils ob­tiendraient alors le pouvoir de discuter les prix proposĂ©s et de nĂ©gocier. De nos jours, l’alphabĂ©tisation et la formation sont nĂ©cessaires pour utiliser les tech­nolo­gies de l’information. Les entreprises sociales peuvent faire que ces idĂ©es ne soient plus un rĂȘve mais une rĂ©alitĂ©. Il est dans l’intĂ©rĂȘt du monde entier d’éradiquer la pauvretĂ©. Une entreprise sociale qui met un point d’honneur Ă  fournir des bĂ©nĂ©fices sociaux peut participer au dĂ©veloppement sans nuire Ă  l’en­vi­ron­nement. Un jour viendra peut-ĂȘtre oĂč il nous faudra visiter des musĂ©es pour savoir ce qu’est la pauvretĂ©.

À propos de l’auteur

Muhamad Yunus a fondé la Grameen Bank, une institution financiÚre pionniÚre de microcrédit qui a permis à de nombreux villageois déshérités de sortir de la pauvreté. Il a reçu le Prix Nobel de la Paix en 2006.